samedi 4 juin 2011

La question des cerisiers au CDP



Prunus padus, le cerisier à grappes (cerisier à grappes #1)


“I believe a leaf of grass is no less than the journey-work of the stars.”


Je ne trouve pas la phrase souvée citée de Walt Whitman sur l'univers dans un brin d'herbe… A-t-il vraiment écrit cela? Ou est-ce une attribution erronée? Le plus près que j'ai trouvé c'est celle citée plus haut. Enfin… je voulais utiliser une citation qui n'existe pas pour ensuite ajouter qu'au Champ des Possibles il y a toujours du nouveau et que l'étude de sa biodiversité n'est pas terminée… Un espace pas très grand, dit-on, une friche industrielle sans grand intérêt à la biodiversité ordinaire… Peut-être, si vous voulez… Mais prenons le temps et regardons à deux fois… Chaque feuille nécessitant une attention généreuse.


Je reviens aujourd'hui sur le cerisier-mystère au Champ des Possibles. Je n'ai pas pu échantillonner les fleurs et je n'ai pas encore les fruits. Je ne dispose que des feuilles pour essayer d'élucider la question. Le cerisier-mystère, plus hâtif, se distingue nettement par sa phénologie des cerisiers de Virginie. Il ressemble beaucoup aux cerisiers du parc devant les Carmélites mais a fleuri un peu plus tôt.  J'ai pris des feuilles de tous ces cerisiers afin de les comparer. Une précision avant de commencer : j'ai identifié les cerisiers du parc, il s'agit du cerisier à grappes, Prunus padus. Il y a de nombreux cultivars de cet arbre et je ne sais pas duquel il s'agit.



De gauche à droite: cerisier-mystère, cerisier de Virginie et cerisier à grappes #1


Les cerisiers portent tous des glandes sur le pétiole. Ce sont des nectaires s'ils produisent du nectar, un liquide sucré. On dira donc des glandes pétiolaires ou des nectaires pétiolaires. J'ai observé une goutte produite par cette glande sur le cerisier de Virginie mais je n'ai pas goûté.*

Chez le cerisier-mystère ces glandes sont "foliacées" elles ont de petites ailes qui ressemblent à de minuscules feuilles. Les glandes du cerisier de Virginie sont nettement placées sur le pétiole et celles du cerisier à grappes (du moins le cerisier à grappes #1) se trouvent cachées sous les lobes de la base cordée. Dans un des billets précédents je disais que les glandes étaient absentes chez le cerisier-mystère et les cerisiers à grappes. Erreur! Elles sont bien là mais camouflées ou cachées. La forme des trois feuilles (voir plus bas) et le placement et le type de glandes distinguent et regroupent nos spécimens. Chez le cerisier-mystère ces caractères semblent intermédiaires… et cela constitue un retour du mystère… 

Cerisier-mystère, cerisier de Virginie et cerisier à grappes #1 du parc


La forme du contour et la texture des feuilles sont différentes chez les spécimens. La constriction de la partie du bas (indiquée par les flèches) est absente chez le cerisier de Virginie mais elle est évidente chez le cerisier-mystère et  le cerisier à grappes. Mais la base de la feuille du cerisier-mystère me semble intermédiaire entre les deux autres. Les glandes foliacées remplaçant en quelque sorte les lobes à la base de la feuille chez le cerisier à grappes. Est-ce seulement l'effet d'un échantillonage limité? Les feuilles varient pas mal sur le même arbre et ce n'est peut-être qu'un artifice de ma sélection des feuilles?

Autre observation : le cerisier-mystère voit déjà ses fruits verts bien développés mais très peu nombreux, tout juste un ou deux par grappes. C'est aussi le cas des cerisiers à grappes du parc: peu de fruits par grappes fleuries. Tant qu'au cerisier de Virginie, le développement des fruits n'est pas encore perceptible mais les quantité de cerises sont toujours maximales, la pollinisation étant toujours parfaitement efficace.




Trois feuilles de trois arbres différents de cerisier à grappes du Parc


Sur la photo ci-haut j'ai pris des feuilles de trois autres cerisiers à grappes dans le parc. Ils sont plus jeunes, ont une écorce différente et fleurissent plus tard que le grand spécimen de cerisier à grappes #1. La constriction de la feuille se retrouve chez tous les spécimens du parc. Ce sont tous des cerisiers à grappes mais il s'agit probablement de cultivars différents du cerisier à grappes # 1. À en juger par le placement des glandes en tout cas! Elles sont sur le pétiole!

Quels rapports y a-t-il entre cette constriction à la base de la feuille, les glandes foliacées du cerisier-mystère et les glandes cachées du cerisier à grappes?

Le cerisier-mystère est-il un hybride? Les hypothétiques parents seraient le cerisier de Virginie et le cerisier à grappes. C'est très incertain... et peu probable. Le moment de la floraison les isole… mais est-ce toujours le cas? C'était la première fois que je remarquais cette distinction phénologique au CDP. Le drôle de printemps cette année a peut-être perturbé les floraisons et m'a révélé des identités cachées?


Spéculons un peu (beaucoup même) : si c'est un hybride il serait possible de nommer ce nouvel arbre. Le nom commun est évident : le cerisier du Champ des Possibles. Je n'ai pas en mémoire les règles de nomenclature mais en latin ça pourrait donner Prunus x campo-possibilitas ou quelque chose comme ça.


Cherchant à identifier le cerisier-mystère du Champ des Possibles je l'ai distingué du cerisier de Virginie et supposé qu'il était un petit des cerisiers à grappes un peu plus loin. J'avais cru le mystère résolu. Rien n'est moins certain! Je suis devant un autre mystère, plus difficile à élucider: c'est peut-être un hybride entre ces arbres.


Pour paraphraser Whitman: 

“I believe a leaf of grass is no less than a journey to the stars.”
 

Les deux autres billets où j'ai palé de ce cerisier-mystère:

Incertaines cerises
Printemps pressé



*La fonction de ces glandes méritent à elle seule une étude! Est-ce pour attirer les fourmis qui agiraient alors comme gardiennes contre d'autres insectes?


2 commentaires:

  1. Merci pour cette très intéressante discussion botanique.

    Pour ce qui est de Walt Whitman, il suffisait de Googler la citation pour trouver :

    "I believe a leaf of grass is no less than the journey-work of the stars,
    And the pismire is equally perfect, and a grain of sand, and the egg of the wren,
    And the tree-toad is a chef-d’oeuvre for the highest,
    And the running blackberry would adorn the parlors of heaven,
    And the narrowest hinge in my hand puts to scorn all machinery,
    And the cow crunching with depress’d head surpasses any statue,
    And a mouse is miracle enough to stagger sextillions of infidels,
    And I could come every afternoon of my life to look at the farmer’s girl boiling her iron tea-kettle and baking shortcake.

    L'emplacement du livre en ligne est : http://www.bartleby.com/br/142.html

    J'espère que mon commentaire ne démolit pas un flou artistique volontaire. Si oui, il faut l'ignorer.

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  2. .

    Si un simple brin d'herbe est un passeport vers l'infini, que penser de tout un cerisier?

    Chaque atome est une porte des étoiles.

    J'adore la Nature. D'ailleurs, le photographe que je suis s'agenouille perpétuellement devant Elle, jusqu'à l'aplatventrisme, en pétant vers le ciel.

    .

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