mardi 28 septembre 2010

Figuier en fugue!



Une ressemblance frappante avec les montagnes près de Jalalabad, non?

Le milieu urbain est fertile en surprise. Une forte concentration d’humains aux comportements variés favorise l’improbable. Et le climat y est un peu plus doux... mais attendons encore quelques jours avant de parler de l’été qui décampe... La vigilance d’une lectrice (Paola) m’a permis d’identifier cette plante mystère dont j’ai parlé dans ce billet du 14 septembre: Stabat Arbor 10.

Elle m’a suggéré un figuier. Mais bien sûr! Je savais que ma plante avait du latex mais je n’aurais jamais fait le lien avec les Ficus qui ont aussi du latex. Pensez au familier Ficus elastica, le caoutchouc. Et évidemment (après-coup!) les feuilles ont une ressemblance avec une plante que je connais bien, Ficus carica, l’espèce la plus cultivée pour les figues. Encore ici la texture particulière des feuilles de mon mon sujet, assez rigides et légèrement verruqueuses, m’empêchait de me rendre à l’évidence! La connection ne s’est pas fait dans ma petite tête vu l’incongruité de trouver cet arbre poussant spontanément dans une ruelle à 10 minutes de chez moi. Nous sommes à Montréal et nos hivers sont sibériens! (si, si!) L’arbre se trouve là depuis au moins l’an dernier quand je l’ai aperçu la première fois.





L’identité de cette espèce est donc:

Ficus johannis subsp. afghanistanica (Warb.) Browicz. De la famille des Moracées, avec le genre Morus, les mûriers qui donnent les “vraies” mûres... eux aussi avec des feuilles lobées et très variables.

Le figuier d'Afghanistan est certainement l’espèce la plus tolérante au froid. J’ai trouvé une courte note disant que le  figuier d'Afghanistan poussait spontanément en Allemagne (Bavière) aussi. On le cultive à l’extérieur au Maryland. Une autre note affirme qu’il résiste à des gels atteignant -23°C mais que les parties aériennes sont atteintes à partir de -15.0 °C. GardenBreizh




J’accorde donc, avec enthousiasme, 9 points Flora Urbana sur les 10 points promis à la personne qui identifierait l’espèce. Paola m’a indiqué le genre et une espèce très proche. Et cela m'a permis encore d'être étonné puis d'identifier cette arbuste. Merci!

Un bon compte rendu de l’espèce ici: Arthur Lee Jacobson



dimanche 26 septembre 2010

Place à la nature?


Tout un programme: mais c’est raté!


Afin de favoriser la biodiversité urbaine nous devons ré-examiner nos façons de concevoir et de faire nos aménagements paysagers et autres verdissements. L’utilisation d’espaces résiduels, marges d’infrastructures ou terrains vagues, nous offrent des opportunités uniques de partage de l’espace avec “les autres”, ces centaines d’espèces qui vivent avec nous. En regard des discours officiels sur la biodiversité et vu les limitations budgétaires et la rareté des espaces, nous devons tirer le meilleur parti possible des opportunités qu’offrent ces espaces résiduels. La plus grande difficulté de faire un peu de place à la biodiversité réside en fait dans nos cerveaux. C’est que nos représentations de l’espace vert et de sa vocation manque de discernement: nous oublions qu’il s’agit aussi d‘habitats (réels ou potentiels) pour bien des petites choses...

À partir d’une de ces occasions ratées de création d’un habitat, je vais esquisser quelques façons différentes et écologiquement adaptées afin de mieux rencontrer nos obligations.




View Pauline-Julien in a larger map
Carte localisant la butte de la rue Pauline-Julien


Près du Centre-Ville de Montréal, les rares zones encore “développables” sont habituellement les zones post-industrielles près de la voie ferrée. À la limite nord de l’arrondissement du Plateau Mont-Royal (voyez la carte Google ci-haut) quelques rues dont la rue Pauline-Julien sont nées de la construction de plusieurs grands ensembles résidentiels. Le quartier est très en demande et tous ces gens se sont librement installés devant ce qu’ils considèrent ensuite une horreur: la voie ferrée. Alors on leur a fait (à nos frais publics) un écran de béton sur une butte afin de ne pas trop perturber leur vue et leur qualité vie. Mais comme le béton est encore plus horrible que le chemin de fer on se mit à végétaliser (surtout par la plantation d’arbres) afin de cacher cet affreux mur, un écran cachant un autre écran.



 Vue de la rue Pauline-Julien vers l’ouest, fraîchement fauchée.

Une belle grande bande végétalisée et lentement enrichie d’espèces spontanées, dont tout le catalogue des “mauvaises herbes” de la voie ferrée (et bien d’autres choses...) s’installe sur l’espace nouvellement créé. Mais voilà: des résidents se plaignent ensuite de toute cette végétation sauvage et des dangers (?) que cela représenterait. “C’est pas propre!”. "Ya des voleurs qui s’y cachent”, etc. Les services municipaux ont les mêmes représentations sur la nature en ville. Faut que ce soit propre! Faut rectifier! Ils vont alors au-devant des “besoins” des résidents et agissent. D’une main ils plantent des affiches annonçant que dorénavant on fait place à la nature, et, de l’autre passent la faucheuse sur tout l’ensemble. Assez perplexant! Non?




Un des nouveaux ensembles immobiliers, style “maison de ville” je crois.

Il y a en fait tout un ruban de nature potentielle sur ces bandes de terrains le long de la voie ferrée de la rue Saint-Denis jusqu’à la rue Papineau, et c’est plus d’un kilomètre de butte-écran qui a été ouvragé. Ce sont donc des fonds publics qui, par du grand terrassement puis du verdissement, subventionnent et maintiennent la valeur immobilière de ces habitations. Il faut probablement voir ici une formule qui compte sur un retour éventuel en taxes foncières de l’investissement public. Ça fait donc l’affaire de tout le monde. Dossier réglé!

C’est comme ça, je ne peux rien ajouter! Sauf ce qui suit: nous manquons ainsi l’occasion de faire d’une pierre deux coups! Nous avons collectivement des discours et des engagements envers la biodiversité. Nos verdissements des espaces résiduels puis leur gestion doivent en tenir compte. Des fonds publics ont permis ces travaux et il est possible de satisfaire le besoin d’un écran pour ces résidents tout en remplissant nos obligations envers la biodiversité. Nous devons enrichir ces plantations avec des espèces à haute valeur écologique: nectar pour les abeilles, fruits pour les oiseaux, etc. En masse! Avec générosité!





Bêtement plantés sur deux rangs, 4 ou 5 espèces d’arbres. À quoi bon?

Il faut surtout augmenter l’expertise de nos services d’horticulture en la matière:  suffit-il vraiment de planter 4 ou 5 espèces d’arbres pour se mériter le label “biodiversité”? Il faut aussi faire un peu d’éducation à la tolérance (au minimum...) de la part des voisins de ces nouveaux habitats. Ce sont après tout des infrastructures publiques d’une utilité certaine: qu’ils en prennent note! Qui se plaindrait d’avoir une vue sur un parc ou le mont Royal et d’entendre des oiseaux... et de voir ainsi la valeur de sa propriété augmenter?

La géométrie orthogonale est peut-être la meilleure pour les humains... mais certainement pas pour la biodiversité. La photo ci-haut nous montre un paysagisme de catalogue sans aucun effort, aucune imagination ou générosité. Les besoins d’un site naturalisé sont distincts des besoins d’un ensemble d’habitation. La routine d’une plantation rectiligne a peut-être sa place dans un environnement formel comme un parc ou un ensemble d’immeubles. Mais elle est assez incongrue dans une zone où c’est la biodiversité qui est visée. Il n’y a par exemple que les espèces d’oiseaux les plus communes (étourneaux, pigeons et moineaux), parfaitement habituées aux humains et capables de se débrouiller avec ces drôles “d’installations” qui viendront ici. Les autres éviteront. La faible diversité des oiseaux vous étonnent? Quelle place leur fait-on? Déjà de l’autre côté de ce mur sur la voie ferrée la diversité des oiseaux est plus grande...





Planter des arbres comme on dessine des rues...

Même le choix des espèces d’arbres me laissent perplexe. On y planté des érables de Norvège et des marronniers glabres, des micocouliers et des cerisiers ‘Schubert’, des frênes et quelques pins. Ce ne sont certainement pas des choix en fonction de l’indigénat qui ont été fait. Alors pourquoi de pas inclure des espèces à croissance rapide et parfaitement adaptée au milieu urbain? Ou conserver les arbres qui s’installent tout seul... Ce qui ne convient pas sur un trottoir ou un parc mérite certainement une sérieuse reconsidération dans un milieu en “naturalisation” comme cette butte. Source d’économie assurée (combien coûte une graine d’érable à Giguère, de frêne, de peuplier, etc.?) et effet immédiat... Un érable à Giguère croît jusqu’à 2 m et plus en une saison... Les cerisiers de Virginie s’installent tout seul, les frênes arrivent rapidement aussi, et les peupliers, etc. Je ne parle même pas des impacts positifs, de ces fameux services environnementaux gratuits (vraiment gratuit dans ce cas) que fournissent rapidement  ces arbres. L’économie qui en découlerait permettrait l’achat d’arbustes à fruit et d’espèces herbacées vivaces. Why not?




Et pourquoi ne pas planter de sorbiers sur nos buttes? 

Comme chez cet ensemble de condos où on a apparemment choisi les arbres (des sorbiers des oiseleurs, Sorbus aucuparia) en fonction de la couleur des fruits qui s’agencent avec la couleur de la brique... Choisir en fonction de critères esthétiques ou écologiques, selon une différenciation du site n’est pas une mauvaise idée. Une classification de tous nos espaces verts est souhaitable. Si le promoteur à travers un paysagiste a pensé à planter ces arbres, comment se fait-il que personne n’y ait pensé pour la butte? Les sorbiers sont trop petits? Ils font de sales fruits sur le trottoir? Ils ne vivent pas longtemps? Et quoi encore? Ce sont des critères peut-être pertinents pour une plantation sur un trottoir mais dans un “site de verdissement écologique” c’est à côté de la plaque. Le merle américain s’en fout. Pour lui tout cela est bon.




Le marronnier glabre (Aesculus glabra) pour qui ce beau jaune? Pour la biodiversité?

C’est un choix assez douteux que d’introduire des espèces en fonction de critères esthétiques. Le choix de cultivars aussi est une solution facile. Même les troncs sans branches des arbres standards de la pépinière, nécessité sur un trottoir, sont totalement incongrus dans un site de “naturalisation”. Un autre détail à examiner!

Prenons maintenant le cas du marronnier glabre ci-haut. C’est un arbre non-indigène et ses fruits attrayants pour les enfants (parce qu’ils ressemblent à des châtaignes ou “marrons”) sont toxiques. Mais comme il a de belles fleurs au printemps et de belles couleurs automnales il est jugé “acceptable”. Il est étonnant que des critères esthétiques permettent sa plantation malgré sa toxicité et son non-indigénat. Alors que l’érable à Giguère (Acer negundo) ou le robinier faux-accacia (Robinia pseudaccacia) eux aussi non-indigènes, mais utiles à la biodiversité et tolérant du milieu urbain, avec une croissance rapide, ne se voient pas accorder le même respect: ils sont jugés indésirables! Les critères utilisés me semblent bien obscurs... Ou improvisés! Ad hoc!




Un pin, d’accord. Et des viornes, des aulnes, ou des cornouillers, pourquoi pas?

Le paradigme “espèces indigènes” ne conduit même pas à choisir un arbre-emblématique de l’île de Montréal, de son écologie et de son histoire: la simple et magnifique aubépine, le glorieux cenellier (Crataegus spp.). Ses épines sont-elles plus dangereuses que les fruits toxiques du marronnier glabre? La butte dont il est question ici n’est pourtant pas aménagée pour la circulation humaine. Pourtant l’aubépine est probablement le petit arbre le plus utile à la biodiversité: site de nidification recherché par de nombreuses espèces d’oiseaux, fleurs à nectar au printemps, des dizaines d’espèces d’insectes de tous ordres le fréquentent et s’en nourrissent, des petits mammifères grignotent son écorce, etc. Ses fruits sont de plus une importante nourriture d’automne et d’hiver pour les oiseaux et petits mammifères. L’arbre-roi couronné par l’ensemble de la biodiversité! Épines comprises! Alors, nous en plantons?

Nous disons faire pour la biodiversité mais nous plantons des espèces qui ne conviennent qu'à nos goûts!




Peinture murale de Caroline Grosd’Aillon dans l'entrée du plus récent immeuble.

La peinture murale ci-haut pourrait être une aubépine en fleur! Préférons-nous une représentation de la nature dans l’entrée d’un immeuble à cette même nature en vrai juste en face?

Si nous souhaitons être jugé favorablement en regard de nos discours sur la biodiversité il faut en arriver à une gradation de ces choix en fonction du contexte: s’agit-il d’un trottoir, d’un parc de détente ou d’un milieu “naturel”? Le choix des plantations est ainsi plus rationnel et une gestion différenciée de l’entretien de ces espaces peut être mise en place.

Le champ est ouvert pour la création d’habitats riches pour la biodiversité en milieu urbain. Il faut pour cela se départir du regard anthropocentriste (esthétique et autre) que nous avons. Si vous êtes une mésange qui pèse quelques grammes vous aimez la sécurité que représente un branchage touffu. Vous aimez aussi une variété d’espèces végétales offrant une variété de ressources: abri, matériau pour le nid, plus grande diversité d’insectes ou de fruits, etc. Ce qui convient à cette mésange est à peu près exactement le chaos qui nous fait tant horreur, le bordel qui nous fait craindre un impact négatif sur la valeur foncière de notre domicile. Il s'agit d'une simple méconnaissance.

Une vue sur la nature du Mont Royal a un impact “positif” sur la valeur foncière  (et la qualité de vie...) partout autour. Pourquoi cela devient-il un facteur négatif sur la rue Pauline-Julien ou ailleurs?




La butte “naturalisée” de la rue Hélène-Baillargeon, près de Saint-Denis. Effrayant?

Il est craindre que la butte de cette autre section (la première construite en fait) portant le nom de rue Hélène-Baillargeon, connaisse le même sort que celle de la rue Pauline-Julien: une rectification majeure s’en vient. Sur cette vue d’ensemble nous avons une idée de ce que serait devenu les sections “corrigées” par la fauche sur Pauline-Julien.

Le même style paysager (!?) avec une plantation des arbres sur deux rangs: à l’arrière-plan contre le mur de béton des tilleuls (dont les feuilles tourneront au jaune bientôt) et devant des cerisiers “Schubert” (encore ce foutu rouge!). La densité de la végétation s’explique par les plantations de vivaces à l’origine. Mais il faut aussi constater que toute la flore de la voie ferrée s’est ammenée à son tour. Il y a donc de tout! Framboisiers, carottes sauvages, onagres, vignes des rivages, verges d’or et asclépiades, vinaigriers et verveines, herbe à poux et eupatoires. De tout! Et j’en oublie... Ce qui suit surtout....




Cette jeune aubépine vaut cent cerisiers ‘Schubert’. Va-t-on la protéger?


Il y a même une rareté des plus intéressantes: une jeune aubépine spontanée. C’est que  nous sommes à 200 m de la seule aubépine sauvage (Crataegus canadensis) qu’il reste dans l’arrondissement! J’ai le spécimen (qui est mal en point) à l’oeil depuis quelques années et c’est un écotype montréalais à préserver à tout prix. Vous croyez que sa trop rare progéniture survivra au travail des employés de l’arrondissement?

Le nettoyage s’en vient-il? Ce serait une perte cruelle!




Les fruits de la dernière aubépine sauvage du Plateau?


La place à la biodiversité urbaine est-elle si difficile à accommoder? La plus grande difficulté réside dans nos têtes. Ai-je semé une graine en terre fertile?

SAUVONS L'AUBÉPINE!



vendredi 24 septembre 2010

Bambou boréal



Utilisé en vannerie depuis des siècles le saule des vanniers ou osier vert (Salix viminalis, espèce eurasienne) est aujourd’hui ici utilisé pour faire des haies ou en phytorémédiation des sols contaminés. On plante des boutures, on arrose et hop! Un mur vert. Quelqu’un a eu l’idée d’en faire un écran anti-bruit sur une rue achalandée. Ça nous donne une curieuse impression de bambous.





À Montréal dans le quartier Saint-Henri de l’arrondissement du Sud-Ouest, à l'Allée des Tanneries, on l’a planté avec un peuplier hybride à des fins de phytoextraction des polluants métalliques  (cadmium, plomb, arsenic, cuivre et zinc) d’un site post-industriel.

Voyez cet article dans FrancVert




On utilise aussi le saule des vanniers à grande échelle afin de cacher de vilains murs de béton qui sont des murs anti-bruit et/ou des écrans cachant de vilains endroits comme les voies ferrées. Personnellement j’utiliserais des érables à Giguère (Acer negundo) qui n’ont rien à envier aux saules en fait de vitesse de croissance avec leurs deux mètres (et plus!) par année et leur grande utilité pour la biodiversité.

En plus de constituer un gain net en terme paysager! Mais on aime pas Giguère!

Voyez cette page du Jardin Botanique de Montréal


Consultez cette source de bouture au Québec: Saules Québec


Salix viminalis, common osier, osier basket willow




mercredi 22 septembre 2010

Giguère le Casseur, Weed Man et autres histoires


 Acer negundo, alias érable à Giguère occupé à faire des mauvais coups!

Giguère se fâche jamais. Mais ça l’empêche pas de casser la baraque! Ou la clôture...
Les gens de la clôture s’en prenne à lui et opte pour sa disparition, morceau par morceau... Que feront les briqueteurs?




Je ne pouvais laisser passer cette occasion en or de faire un peu de publicité!





De gauche à droite: une échappée des bacs de la rue Duluth, où elle était cultivée il y a deux ans: Nicotiana langsdorfii au beau parfum de nuit. Le shiso, Perilla frutescens, en flagrant délit d’évasion d’un jardin. Ses graines tomberont sur le trottoir et on la trouvera dans les alentours l’été prochain. J’en trouve à l’état spontané un peu plus à tous les ans. Et la très fertile orchidée urbaine, Epipactis helleborine, chargée de fruits aux mille graines.




Celui qui a durablement renouvelé le graffiti et un des plus intéressants artistes de Montréal vient de Toronto. Ce soir projection du film “Roadsworth: franchir la ligne”. Devant le chalet du parc Laurier à 20:00h. À Montréal... Son site web: ROADSWORTH

Dommage que les autres graffitistes n'aient pas encore remarqué...




Et pour terminer: l’arbre mystère de la semaine (enfin du moment...). En le voyant si on connaît les arbres on se dit que c’est un.... Mais en fait c’est plutôt un... Réputé être le seul de son espèce à Montréal. Bon assez d’indices (!) 20 points, je dis bien 20 points Flora Urbana en OR pour qui identifie correctement cet arbre!

À moins que le gagnant opte pour une graine: j’en ai!



lundi 20 septembre 2010

Saint-Christophe des ruelles


la guêpe germanique, commune en ville et très active à l’automne...

Saint-Christophe est le patron des voyageurs et des mecs qui vont prendre l’air un peu. Saint-Christophe est aussi le nom d’une de ces rues/ruelles de mon quartier. Le temps était magnifique dimanche et il fallait en faire le plein, parce que bientôt... J’étais passé quelques jours auparavent et un plok! avait attiré mon attention. De grosses poires tombaient d’un arbre, aidées par des écureuils qui faisaient clairement des excès: les poires devaient bien faire au moins trois ou quatre fois leurs poids... Les poires sont toujours là et ce sont des guêpes, Vespula germanica, qui en boivent le jus sucré.




 Parthenocissus quinquefolia, la vigne vierge en fruit prend ses bronzés incomparables.

J’ai fait bien des photos des guêpes vu l’ombre profonde qui n’aidait pas le temps d’obturation. Jusqu’à ce que les allemandes remarquent mon intrusion... Reculons quand même un peu... Deux gaillardes me prirent en chasse, heureusement sans grande conviction. Je suis quand même passé à autre chose... Curieux, non, ce manque de gaillardise des guêpes?




Sambucus canadensis, le sureau blanc, lourdement chargé de fruits.

Il y a quelques beaux spécimens de sureau dans le coin. Je suis toujours étonné de voir la quantité de fruits que l’arbuste produit, les lourdes grappes arquant les branches de toutes parts. Quelques fruits tombés au sol fermentaient, l’odeur étant bien perceptible. Et si les guêpes pas trop vaillantes de tantôt s’étaient enivrées en consommant de ces fruits? J’ai déjà vu des guêpes saoules (comme la Pologne cette fois...) du nectar fermenté de l’orchidée urbaine Epipactis helleborine. Les vespides en bacchanales! C’est bien la fin de la saison...




Un vitis sans identité précise

Et j’ai goûté aux très petits fruits du sureau, plusieurs en fait, je voulais m’assurer d’en apprécier la saveur. Mais celle-ci est indétectable. Comme les graines d’ailleurs... je devrai vérifier cela cette absence des graines. À moins qu’elles ne soient extraordinairement petites??? Bronwyn Chester me dit que le goût se révèle à la cuisson. J’en cuirai cette semaine. Tiens, pourquoi pas tout de suite?




Un des nombreux pommetiers de cette ruelle.




Et un bruit dans les branchages au-dessus de la tête..


Dans un billet précédent, L’art de la disparition, je vous parlais de cette espèce d’oiseau disparu, latour (oups! drôle de faute de frappe!), la TOURTE (oui je sais bien qu’ailleurs on dit la TOURTRE). Je me suis toujours interroger (faute de frappe volontaire cette fois) sur les conséquences de la disparition d’un vecteur de propagation des graines ayant certainement une importance écologique majeure. Il y avait des milliards de ces oiseaux consommant les fruits des arbres, semant ensuite dans leurs fientes les graines de nombreuses espèces partout en Amérique du Nord (ou presque). Combien espèces d’arbres ont souffert de la disparition de l’oiseau?

Encore: lisez cet excellent Wiki sur la tourte voyageuse.





Les pigeons urbains sont nombreux mais n'atteignent certainement pas les nombres fantastiques de la tourte. J’avais remarqué ces jours-ci que les fruits du micocoulier (Celtis occidentalis) étaient bien mûrs à en juger par leur couleur noire. Mais je n’avais jamais remarqué avant dimanche que les pigeons s’en nourrissaient! La technique me semble assez approximative, les pigeons se posant avec difficulté sur les petits rameaux flexibles de l’arbre et peinant à garder leur équilibre. Les fruits sont des drupes portés par de grêles pédoncules  avec bien peu de chair mais ils sont assez savoureux et un peu sucré.





Depuis une quinzaine d’années il y a un regain d’intérêt pour les arbres indigènes. On cherche parmi eux ceux qui sont adaptables au milieu urbain exigeant qu’est un trottoir. Sur la rue Duluth à Montréal on a donc planté plusieurs micocouliers, le “bois inconnu”, comme le nommaient les colons français parce qu’il ne ressemblait à rien de connu alors en Europe.

Je trouve des petits micocouliers spontanés dans le quartier depuis quelques années. Je crois que je viens de trouver les semeurs! Un exemple de ce que j’appelle novécologie: une espèce indigène, Celtis occidentalis, en lien écologique avec une espèce introduite: le pigeon biset (Columba livia).

À vos yeux le pigeon gagne-t-il un peu de respect pour son travail de préservation de ce cousin des ormes? Il y a un peu de la tourte dans nos rats volants...





Et pour terminer un tableau vite fait de mes trouvailles de dimanche, dans la ruelle Saint-Christophe. Patron des voyageurs, des promeneurs des ruelles et des tourtes voyageuses, parties pour de bon. La récolte est encore bonne cet automne mais elle a un petit goût amer...


samedi 18 septembre 2010

Petit arbre qui se dessine.


Sorbus decora, le sorbier décoratif, devant le précipice d’une carrière


Il se met souvent dans les endroits les plus improbables où son installation sera difficile et semée d'embûches. Avec un art fait de certitude déterminée il s’accroche aux pierres, sur les falaises ou au tronc des autres arbres, confiant de réussir avec sa façon de funambule, d’acrobate et de voltigeur. Dans ces situations exigeantes la base de son tronc est toujours tortueuse et nous révèle la difficulté de la tâche. Il s’accroche en s’enracinant et prend  pied le plus fermement possible, résistant à tous les coups qui viendront: le vent, les brouteurs, la gravité ou la bousculade du grand arbre qui ne veut pas de lui. Si le petit arbre est bien accroché et fermement ancré il peut révéler alors la raison de cet exercice et de son art: regardez la grâce de ses branches qui s’arquent de tous côtés souvent dans un seul plan dont lui seul a le secret. Il se fait plat et nous offre un point de vue privilégié qu’il nous faut découvrir en tournant autour. Si c'est possible...

En général toutefois ce point de vue est celui que l’on aperçoit en premier! Il présente toujours son bon côté! Évidemment il y a ici quelque chose à fouiller... Vous croyez qu’il est tout simplement gracieux de tous bords tous côtés? Photogénique, bêtement? Ou comme c’est un de mes sujets d’étude ces temps-ci et que je le cherche dans des endroits reculés et peu fréquentés c’est plutôt de mon plaisir de le trouver qu’il s’agisse? En attendant cette  méta-analyse, disons qu’il est toujours égal à lui-même: parfait!

La préparation à la légèreté de cette silhouette est néanmoins très ardue. Le sorbier ne pousse pas, il se dessine. Sorbus decora est un arbre-pantographe.






Les froids d’automne ou même le gel concentre le sucre des fruits de nombreux arbres. Avec les aubépines, les génévriers ou les nerpruns, les sorbiers font partie de ces arbres dont les fruits doivent geler pour atteindre un taux de sucre intéressant pour les oiseaux. Les sorbiers sont présentement chargés de fruit, pas un oiseau y touche. Ce sera une nourriture plus intéressante bientôt, les fruits du petit arbre les garderont au chaud.

Cet été je l'ai cherché un peu partout sur l'île de Montréal. Je suis à la recherche d'écotypes c'est à dire d'individus "sauvages" représentatifs des populations indigènes et parfaitement adaptées au climat et à l'écologie de Montréal. Pourquoi? Dans le but d'introduire des espèces qui ne soient pas des sélections horticoles au Champ des Possibles et ailleurs. J'espère revenir bientôt sur ce sujet intéressant.

Sorbus decora, sorbier  décoratif, sorbier plaisant, showy mountain-ash.

De la famille des Rosacées avec tant d’autres plantes et arbres fuitiers: pommes, poires, cerises, fraise, ect. On trouve aussi les autres sorbiers Sorbus americana et Sorbus aucuparia poussant spontanément ici et là, souvent en situation périlleuse.



mardi 14 septembre 2010

Stabat Arbor 10




L’érable argenté (Acer saccharinum) a une croissance rapide. Entre deux coups de pinceaux il a déjà fait sienne la clôture. Il la saute et prend le chemin ou le trottoir selon son habitude vagabonde. L’érable argenté est aussi pressé, l’or du temps, il connait!



Épouser la contrainte et avancer les yeux fermés. C’est un bloc solide de racines qui occupe cette fosse d’arbre trop étroite. Qui cèdera?



Et si quelqu’un identifie cet arbre (ou arbuste?) je lui donne 10 points Flora Urbana! Un peu de latex a perlé du pétiole d’une feuille échantillonnée. Les feuilles sont rugueuses et une petite dent termine chaque lobe. Du latex, mais je doute que cette espèce inconnue soit de la famille du pavot (les Papavéracées). Votre aide please!



samedi 11 septembre 2010

Macleaya cordata





Depuis deux ans elle habite sous cet escalier. Arrivée comment?


Je passe assez souvent à ce coin de rue mais je n’avais pas encore remarqué cette plante un peu plus haut sur la rue Saint-Urbain. Une géante de 2 mètres, inconnue et poussant en colonie. Comme j’y arrivais et l’examinais, une résidente descendait l’escalier, armée de sécateur et de gants. Elle croyait avoir à faire avec la grande frayeur actuelle: la berce du Caucase. Je la rassurai, ce n’était clairement pas une plante de la famille de la carotte, les Apiacées, et elle m’assura que la plante aurait alors la vie sauve.




Macleaya cordata: des feuilles très grandes et souples


Je ne la connaissais pas cette plante mais les feuilles avaient l’allure et la forme de celles de Sanguinaria canadensis (photo ci-bas), molles au toucher et pruineuses. En brisant le pétiole un peu de latex a perlé... Je ne sais pourquoi j’ai hésité à me dire “Papavéracée”, la famille du pavot à laquelle appartiennent ces plantes qui ont justement du latex. C’est un bon critère d’identification mais j’hésitais. 




Comparez la feuille de la sanguinaire avec celle du Macleaya plus haut


À ma décharge la sanguinaire est toute petite plante du sol forestier et fait une seule grande fleur blanche. Ici j’avais affaire à une haute plante portant des pannicules plumeux. La morale de l’histoire: si ça a des plumes, que ça vole et que ça pond des oeufs, c’est un oiseau Roger! Je tâcherai de m'en rappeler!




Une plante de 7 pieds! un fruit et détail de l’inflorescence.


Macleaya cordata: vivace rhizomateuse originaire de la Chine, Taiwan et Japon.


Noms communs: Macleaya à feuilles cordées, Macleaya cordée, Bocconia, pavot à panicule, Plume Poppy.


J’espère toutefois ne pas avoir confondu avec Macleaya microcarpa...




vendredi 10 septembre 2010

L’art de la disparition







 L’exotique devenu familier puis rendu étrange


L’américain Walton Ford fait des aquarelles grand format où son travail méticuleux mêle allégories, histoire, colonialisme et folies ordinaires des humains. Nous oublions facilement devant une aquarelle d’Audubon qu’il a en fait tué bien plus d’oiseaux qu’il n’en a jamais peint. Et il en va ainsi de toute l’histoire de l’histoire naturelle... et humaine!


Reprenant le style des images des publications naturalistes du 19e siècle, sur du papier jauni avec des notes au crayon ajoutées par un naturaliste qui n’existe pas, Walton Ford voyage dans le temps et dans nos représentations de la nature. Il nous donne une histoire ré-écrite de la découverte souvent sanglante des nouveaux territoires et des nouvelles espèces. Encore au tout début du 20e siècle l’allemand Friedrich Robert von Beringe aura le réflexe “naturel” de l’époque devant une nouvelle espèce : il tue deux gorilles des montagnes pour avoir des spécimens à ramener. Le gorille des montagnes est une espèce menacée et porte maintenant, en tant que sous-espèce, le nom de son "découvreur" : Gorilla beringei beringei. Pas mal, non?




Des milliards (eh! oui) de tourtes habitaient notre région.


Les facteurs expliquant la disparition de la tourte sont complexes et interreliées. La déforestation est une de ces causes. Peut-être est-ce phénomène qu’illustre Walton Ford sur cette aquarelle. Ou à moins qu’il ne s’agisse que d’une référence au fait bien connu que ces oiseaux nichaient par centaines dans un seul arbre. Les sites de nidification s’étendaient littéralement sur des kilomètres... La chasse s’en trouvait d’autant facilitée... Les nombres et les comportements de masse de la tourte étant les causes mêmes de leur disparition. Il n’y a plus de tourtes, elles ne survivent que dans le nom de nos tourtières. Comme pour le gorille nous avons nommé sa disparition.


Lisez cet excellent Wiki sur la tourte: Ectopistes migratorius


Les naturalistes n’ont évidemment pas causé la mort de toutes ces espèces: dodo, tigre de Tasmanie, et chez nous: tourte, etc. Ce sont nos comportements de masse en appétit de tourtières qui ont fait le boulot, le ventre plein de cette nourriture tombée du ciel... La biodiversité passe par notre estomac... et disparaît...




En Tasmanie ce “loup” dévorait (disait-on) les moutons.

Le tigre de Tasmanie (oui, un cousin du diable de Tasmanie) était un marsupial carnivore. Je me souviens de l’étonnement ressenti la première fois que j’ai vu un court film le montrant encore vivant dans les années 30. Comme pour le loup une prime était donnée pour chaque carcasse. La sécurité des familles des colons, de leurs moutons (et de leurs chiens apparemment effayés par l’odeur du “monstre”) a vite conduit à l’extermination de Thylacinus cynocephalus. Il "vit" aujourd'hui sur les armoiries de la Tasmanie, avec au bas la devise  "Ubertas et Fidelitas" : "Fertilité et Foi".

Voyez tous les films connus réunis ici: compilation de films

Visitez  The Thylacine Museum

 




J’ai fait ce petit montage en mémoire de la bête que j’aurai volontier adopté. Ni canin ni félin. Je nous imagine traversant le bush australien, chassant le lapin. Ou autre chose...

Quel était son cri?




Pour en savoir plus sur l’artiste:

Une galerie de photos
Un film. Vous aurez aussi une idée de la dimension de ses aquarelles.
Tigers of Wrath: Watercolors by Walton Ford





lundi 6 septembre 2010

Pointe-aux-Prairies à Pointe aux Trembles 1


Vue de l’entrée sur la rue Notre-Dame, le fleuve est derrière nous.

Lundi il y a une semaine maintenant je suis allé visiter le grand Parc-nature de Pointe-aux-Prairies. C’était alors la pleine canicule (la deuxième canicule cet été) mais je supporte bien cette grande chaleur hochelaguienne*. Le truc est simple: je préfère ça aux froids insupportables de l’hiver. Et j’apporte de l’eau. Et de toute façon je suis content de finalement revenir par ici où je suis passé bien avant que ce soit un parc. L’entrée et prometteuse: un débordement de verdure avec les belles vignes des rivages qui atteignent presque le rivage. Ce serait pas mal d’enfouir ces fils et faire disparaître ces poteaux, non?




Étonnant, le CN réussi ce qui est impossible pour le CP: un passage à niveau...

Pointe-aux-Prairies est à quelques kilomètres seulement d’où je suis né, de l’autre côté du pont Legardeur à Repentigny. C’est mon Heimat: des paysages familiers devant le fleuve Saint-Laurent, campagnes en plaine, grands champs, morceaux de forêts vestigielles... Ce qui m’amène ici? Les aubépines. Vous verrez. Mais pour l’instant il suffit de savoir qu’ici c’était l’entrée du cimetière Hawthorn-Dale. La vocation a changé. Out l’anglais...




Maintenant c’est un “parc” et on soigne l’entrée en coupant l’herbe sous les panneaux d’indications. Il est important de soigner les panneaux d’indications. S’ils ne sont pas bien soignés on ne saurait pas qu’on est dans un Parc-nature. Et on fait je sais pas quoi à ces plantations qui n’ont rien à voir avec l’idée d’un Parc-nature. Comme ailleurs à Montréal on fait toujours de grands efforts pour informer, éduquer, rassurer avec le code du familier (en plus de mettre des panneaux d’indications...). Donc dans cette allée on a fabriqué ces carrés de bois dans lequel on a fait des plantations “éducatives” avec des affichettes boulonnées de façon à résister à tout y compris les hivers insupportables ou la... canicule.




Les plantes ont moins bien résisté apparemment et comme solution de rechange, pourquoi pas (?), on y a mis des hostas...On a eu les meilleures intentions du monde, faire de la place à la nature et adopter une mission d’initiation à cette nature, puis on a perdu l’intérêt ou manqué d’argent... C’est l’intention qui compte, non? “Mettons des hostas”. 




La même allée un peu plus loin, plantée de pommetiers. C’est beau en fleur des pommetiers. Mais ça s’appelait Hawthorn-Dale ici, le “vallon des aubépines”... Et je pense que des aubépines en plus d’être beau c’est aussi quelquefois pertinent... C’est le terroir propre aux cenelles ici, je vous l’assure! Non pas dans cette dense forêt avec de grands chênes, mais  tout autour, le long des chemins traversant les champs. Tout ce travail et ces investissements, expropriations, etc. pour créer un Parc-nature et on accueille les gens comme dans leur jardin... avec les mêmes végétaux familiers... ou des domestiques hostas! Imaginez un jardin zoologique qui aurait un poisson rouge comme emblème. Un sourd rugissement mouillé...




On ne voit pas fréquemment d’aussi importantes colonies de cette plante: Echinocystis lobata (concombre grimpant, balsam apple, p.188). Les fleurs mâles sont ces panicules dressés de fleurs blanches. Les fleurs femelles, bien moins nombreuses, sont à la base des panicules, contre la tige, et produisent ces curieux fruits épineux. On voit aussi les longues vrilles de ce cousin des concombres véritables.




 Une pause de canicule à l’ombre d’un robinier.

Pourquoi être si déplaisant? Pourquoi gâcher ainsi ce qui aurait pu être un agréable compte-rendu d’une visite que j’ai bien aimé? Poussons la réflexion. Dans un parc de quartier les espèces et leur écologie (la biodiversité) sont au service de l’horticulture et des besoins humains. Dans un Parc-nature l’horticulture et la science se doivent d’être au service de la biodiversité, non? Plantez-donc des aubépines, question de mieux les faire connaître...

Et je n’essaierai pas d’être moins épineux au prochain billet! 


* Pas toujours facile les néologismes: mais c’est mieux que “grandes chaleurs hochelagaines”... Qui connaît l’adjectif de Hochelaga?